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L'art populaire de la Russie

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Kholouï



L a petite ville de Kholouï est l'un des plus anciens points de peuplement de ce qui fut jadis la Principauté de Vladimir-Souzdal. Au XlIIe siècle au moment de la grande invasion Mongole après la chute de Vladimir, leur habitants a commancé à chercher refuge ailleurs, au cœur de forêts et de marécages moins accessibles. Ils sont installés notamment sur les rives de la Téza construisant ici leur nouvel habitat. La beauté de ce lieu situé au nord-est de la Moscovie éclate en toute saison. Nul ne reste insensible au charme de la rive Téza aux paresseux méandres, mais qui se répand au printemps en des crues impressionnantes, de ses forêts de chênes et de pins, de ses herbages riverains disparaissant l'été sous un tapis de fleurs et en automne sous l'or des feuilles mortes, et se fondant en hiver dans la blancheur universelle des neiges russes. Toutes choses qui ont certainement inspiré les gens du lieu dans leurs oeuvres et dans leur création.Les nouveaux venus se mirent à construire leurs églises, à couler des cloches et à peindre des icônes saintes, dans le travail et la prière.

Icône de la Vierge de Smolensk

Anonyme de la fin du XVIIe siècle
Icône de la Vierge de Smolensk


       Les premiers peintres d'icônes furent ici des moines du Monastère de la Trinité. On connaît l'instruction d'archimandrite Afanassi, en vue de recruter à Kholouï dix enfants âgés de 12 à 15 ans, «d'esprit éveillé et disposés pour l'Art de l'icône, sachant lire et écrire, qui recevront le lit, le couvert et l'habit à la Laure et seront instruits en la peinture par le frère Paul». La petite ville reprend de la sorte à son compte, en cette fin du XVIIe siècle, la haute tradition iconographique de la Laure de la Trinité Saint-Serge. Au siècle suivant, cet artisanat prend à Kholouï un rapide essor.La qualité des icônes de Kholouï était le fruit du talent de ses peintres, de leur savoir-faire professionnel, de leur maîtrise de la peinture à la détrempe.En 1882, la Fratrie Alexandre Nevski, de Vladimir, organise à Kholouï des classes de dessin, devenues par la suite l'École de dessin et d'iconographie(1842-1920), avec un enseignement étalé sur six ans et des matières comme l'iconographie, le dessin et la peinture académiques. Le rôle joué à Kholouï par cet établissement fut considérable. Ses élèves les plus doués allèrent poursuivre leurs études à l'Académie des Beaux-Arts, à l'École Stroganov, ils firent des carrières de dessinateurs et de peintres, d'illustrateurs auprès des maisons d'édition de Moscou. D'aucuns quittèrent Kholouï et abandonnèrent leur premier métier pour se faire une réputation dans d’autres domaines artistiques.

V.Pozanov-Molev.Icône de Saint Nicolas

V.Pouzanov-Molev
Icône de Saint Nicolas. Debute XXe siècle


       Grâce à ces professionnels de haut niveau, la qualité des icônes et des fresques put être sauvegardée, l'autorité de l'école spécifique de Kholouï, maintenue, le terrain préparé pour une ouverture de la miniature locale à plus de modernité. Mais la révolution de 1917 et la guerre civile qu'elle déclencha en Russie mirent fin à cette situation porteuse d'espoir. La foi et la religion furent soumises à des persécutions barbares, les actes de vandalisme n'épargnèrent rien ni personne. Avec les églises et les lieux saints, ces monuments de l'histoire et de la culture du peuple russe, périssaient les plus belles créations de la peinture d'icône et de la fresque murale.Les nouvelles autorités ordonnèrent la fermeture des ateliers de Kholouï. Leur personnel dut se chercher un autre travail. Les uns se firent peintres en bâtiment, d'autres allèrent badigeonner le matériel ferroviaire, les péniches, les bornes kilométriques et les barrières de passage à niveau. Pendant de longues années ces professionnels accomplis ne trouvèrent pas à exercer leur métier, le désordre général et la disette reléguaient les Beaux-Arts au domaine du souvenir nostalgique.

D.Dobrynin.Boitier"La Pause"

D.Dobrynin
Boitier "La Pause". Années 1930


    Dans ces conditions, il y avait urgence à trouver des applications inédites à la vieille tradition de la haute peinture iconographique. Et c'est à Palekh, autre foyer réputé de l'art populaire, que naquit l'idée de constituer une artel d'anciens du métier, qui tenteraient leur chance en s'essayant dans le nouveau contexte à des sujets laïques. On renonçait à la planche et à la toile de l'image sainte classique et on les remplaçait par le papier mâché, selon la technologie déjà en usage à Fedoskino, l'autre centre bien connu de l'art populaire, non loin de Moscou. Les gens de Fedoskino montrèrent comment on prépare le papier mâché, comment on le travaille, comment on exécute la laque proprement dite - pour le reste, la méthode fut celles des iconographes traditionnels.Aujourd'hui, la nouvelle branche de l'artisanat décoratif que représente la laque sur papier mâché jouit d'une renommée universelle. Et la patrie des laques russes est indiscutablement Fedoskino, où l'on travaille dans ce domaine depuis deux siècles déjà. A Kholouï, la recherche d'un style propre débuta beaucoup plus tard, au moment où une partie des anciens professionnels commença à rentrer au foyer, après avoir tenté sa chance ailleurs, sans succès notable,un peu partout dans le pays. Encouragés par l'exemple de Palekh et de Mstéra, quelques peintres de Kholouï constituèrent en 1934 leur propre artel et se cherchèrent une nouvelle voie.

M.Rodionova "L'Été"

M.Rodionova. "L'été"
Baguier. 2001


    Mais les difficultés restaient grandes, et la laque de Kholouï, comme va s'appeler dorénavant la miniature sur papier-mâché locale, sera longue à s'imposer. Il convenait avant tout de se doter d'un style spécifique, différent de celui des maîtres de Palekh et de Mstéra, qui avaient fait leurs preuves de longue date. La guerre qui éclate en 1941, la fermeture consécutive de l'Artel et de son école, le départs aux armées des jeunes qui étaient censés poursuivre l’œuvre des fondateurs, tout ceci freina sérieusement le développement du projet. Mais déjà en 1943 le gouvernement trouve la possibilité de ouvrir à Kholouï une École professionnelle des arts appliqués. Las peintres mobilisés au front ou à l'usine sont rappelés au pays pour se consacrer à l'enseignement, les crédits sont débloqués pour l'équipement des classes, le chauffage, les fournitures et l'habillement des élèves.Au mois de janvier 1947 les premiers élèves diplômés de l'École d'arts appliqués entament leur carrière professionnelle. Ils sont au nombre de 14, et parmi eux on remarque immédiatement des individualités comme Nikolaï Babourine, Alexéi Kostérine et Boris Tikhonravov.

N.Babourine. Boitier"Mikoula Sélianinovich"

N.Babourine
Boitier "Mikoula Sélianinovich et les brigands". 1963


    Dès lors, on commence à parler de Kholouï comme d'un des grands centres de la spécialité, ce qui se fait ici est suivi avec intérêt par les musées, les galeries d'art, les organismes commerciaux du pays, les firmes étrangères. La notoriété des laques de Kholouï est faite. Ce qui se fait à Kholouï procède à la fois du réalisme et de la décoration, c'est ce qui en permet une lecture facile, d'autant que la figure humaine y tient une place prépondérante. Le peintre n'use de l'or que lorsque sa présence est fonctionnellement justifiée: coupoles d'églises et de sanctuaires, casques et cottes de mailles des guerriers, brocarts des princes, soleils, lunes et constellations nocturnes. Ceci est une autre particularité de Kholouï, eu égard à ce qui se fait dans les autres centres de la laque russe. Ce qui n'empêche pas que le style caractéristique de l'école locale n'eût continué d'évoluer avec le temps, sous l'impulsion énergique de ses créateurs.On a souvent parlé de «conteurs» à propos de ces miniaturistes dont la prédilection pour le folklore national est une constante jamais démentie. Le fait est que le conte et la légende sont particulièrement adaptés à ce genre figuratif. Ici les sujets favoris sont sans conteste ceux des contes de Pouchkine, mais «Le Petit cheval bossu» de Piotr lerchov, les «Contes de l'Oural» de Pavel Bajov, les contes d'Alexandre Afanassiev et le folklore russe sont à Kholouï des sources d'inspiration dont la fortune n'est pas moins permanente. Les laques d'inspiration folklorique réunissent tous les suffrages par leur candeur sans artifice et leur pureté, petites merveilles de beauté porteuses d'un message de vertu et de bonté. La perfidie, la méchanceté en sont bannies, on n'y trouvera ni la violence, ni le malheur des hommes. Ici règne sans partage la sagesse populaire, triomphent la justice et la vérité, en des images convaincantes et vigoureuses.

E.Gratchev. Ecrin"Morozko"

E.Gratchev
Ecrin "Morozko". 1993





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 Les miniatures laquées
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  - Le jouet moderne
  La dentelle de Vologda
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  Les émaux de Rostov



T.Milouchyna.Ecrin "Eudoxie,mouille ton tablier!"

T.Milouchyna
Ecrin "Eudoxie,mouille ton tablier!". 1991




A.Kostérin.Ecrin"Tchoudo_Youdo la baleine"

A.Kostérin
Ecrin "Tchoudo-Youdo la baleine"
(d'après du conte en vers "Le Petit cheval bossu" de Piotre lerchov}.1978










T.Milouchina. "Vassili Bouslaev"

T.Milouchina. "Vassili Bouslaev"
Baguier. 1977










N.Gordeeva.."Ruslan et Ludmila"

N.Gordeeva. "Ruslan et Ludmila"
Ecrin 2003










A.Smirnov.Coffret "Conte du tsar Saltan"

A.Smirnov.
Coffret "Conte du tsar Saltan"
(d'après du conte en vers de A.Pouchkin) 1994










 V.Bélov.Panneau"Le Petit cheval bossu"


Panneau "Le Petit cheval bossu" (d'après du conte en vers de Piotr lerchov}. 1969










 A.Kostérine.Boitier"La Reine-grenouille"

A.Kostérine
Boitier "La Reine-grenouille". 1967










A.Kamorine.Plaque "Le Preux Sviatogor"

A.Kamorine
Plaque "Le Preux Sviatogor". 1966